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13 mars 2011 7 13 /03 /mars /2011 23:08

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Jean-Louis Sagot-Duvauroux

 

 

Michel Peyret
14 mars 2011

 

 


LES TRENTE-CINQ HEURES
NE SONT PAS LA FIN DE L'HISTOIRE

par Michel Peyret

 

 


C'est Jean-Louis Sagot-Duvauroux qui l'écrit dans l'essai qu'il intitule « Emancipation ».

Récemment, il s'adressait à moi comme suite à la réception d'un de mes articles.

« Je suis en profond accord, disait-il, avec la façon dont tu remets au premier plan quelques traits du communisme pensé par Marx et quelques autres : l'abolition du salariat, le dépérissement de l'Etat, la libre association (que j'appelle plutôt l'appropriation sociale), quelque chose comme la gratuité (à chacun selon ses besoins)...


LA POLITIQUE COMME LIBRE DESSEIN

« Nous avons pris, ajoutait-il, la politique pour une science, alors qu'elle est la construction d'un libre dessein.

« Du coup, nous avons placé les dispositifs rationnels que nous envisagions pour concrétiser ce dessin au-dessus des objectifs eux-mêmes. Stakhanov pour préparer l'abolition du salariat, Staline en prévision du dépérissement de l'Etat, le rattrapage du consumérisme occidental comme prodrome de la gratuité, etc...

« Ma pensée de l'émancipation, telle que j'ai tenté de lui donner forme dans mon essai du même nom, est entièrement polarisée par ce questionnement. Il me semble d'une extrême fécondité, car il porte un renversement de l'action et de la parole politiques, un renversement que je crois à l'oeuvre. »

Jean-Louis Sagot-Duvauroux intitule son avant-propos : « Rouvrir l'histoire de la liberté. »


UN COMMUNISME ECARTELÉ

« Ce texte, dit-il, prétend que l'aventure politique de la liberté reste ouverte. Mais il doit d'emblée s'affronter à un rude problème, car son histoire le relie à une famille d'action et de pensée, le communisme, qui s'est trouvée plus que tout autre écartelée entre des idéaux émancipateurs de haut vol et des traductions politiques qui parfois les ont réduits à rien.

« Avec une énergie et un courage indéniables, le mouvement ouvrier communiste a su affronter des pouvoirs oppressifs puissamment structurés et souvent impitoyables.

« Il a contribué à des modifications des rapports de forces qui ont parfois conduits ces pouvoirs à s'accommoder d'institutions clairement émancipatrices. Son activité critique et son efficacité militante ont réuni autour de lui un peuple immense. En plusieurs endroits de la planète, il a vaincu l'oppresseur et parfois su créer des espaces de liberté inédits. »


ÉMANCIPATION !

« Mais, poursuit-il, là où il s'est emparé de l'Etat, l'organisation politique qu'il a constituée sur la ruine de ces oppressions s'est révélée incapable de réaliser la promesse d'émancipation. Elle a souvent établi des contraintes insupportables pour ceux mêmes dont elle prétendait défendre les intérêts et c'est le désir de liberté qui finalement en a détruit l'assise... »

Aussi, dit Jean-Marie Sagot-Duvauroux, « si le terme « communiste » est conservé pour désigner le courant dont ce texte est issu, mais quand il s'agit de désigner les tourbillons mélangés qu'il a rejoints, il parle, avec beaucoup d'autres, d'émancipation. »

Bien évidemment, il s'agit là de l'opinion de l'auteur, et dont j'essaie de donner à voir la démarche qui, par certains abords, pourrait paraître s'inscrire dans l'existence des « mille marxismes » que j'évoquais récemment.


UN PASSEUR DE FRONTIÈRES

Bien évidemment encore, je n'ai aucune prétention à vouloir formuler ni un résumé de l'ouvrage, ni même une analyse de l'ensemble.

Pour donner à voir, et donc sans trahir la pensée de jean-Louis Duvauroux, j'ai choisi, au sein des six frontières qu'il se propose d'explorer celle qu'il intitule : « Frontière entre la libre activité et l'activité contrainte. »

« Abolition du salariat », tout le monde connait ce mot d'ordre central que Marx demandait aux prolétaires d'inscrire prioritairement sur leurs drapeaux.

« Abolition du salariat », pour notre auteur, c'est un questionnement fort : « Pourquoi ce mot d'ordre et comment s'efface-t-il ? La grandeur du communisme occidental et son effondrement se lisent dans les replis de cette question... »

C'est donc peu dire qu'il s'agit en fait d'un des questionnements parmi les plus essentiels de ceux qui demeurent aujourd'hui.


ABOLITION DU SALARIAT

Pour Jean-Louis Duvauroux, « en inscrivant parmi ses tout premiers objectifs ce mot d'ordre qui nous paraît aujourd'hui tellement exotique, le mouvement communiste des pays occidentaux étendait sa perspective émancipatrice à un champ qui semblait devoir en être jamais exclu: l'activité collective nécessaire à la production de richesses que, dans ses conditions actuelles d'exercice, nous appelons le plus souvent travail. »

Cependant, l'idée a été peu à peu vécue comme surannée, puis elle est tombée dans l'oubli. Aussi, à la fin du 20ème siècle, amenée à réviser ses statuts, la CGT, première organisation syndicale française, s'en débarrasse comme on époussette un fond d'étagère trop longtemps inutilisé.

« Abolition du salariat », Sagot-Duvauroux y revient. « Fin de l'activité contrainte, du temps vendu ou capturé. Temps à soi. Libre activité. Tel était l'objectif affirmé.

« Mais le quotidien ne fut pas du même tonneau : stakhanovisme, apologie du labeur, magnification de la production en masse, par les masses et pour les masses, « dimanches communistes » c'est-à-dire volontairement travaillés, discipline d'atelier comme métaphore des enrôlements de parti.... »


RETOUR DU TRAVAIL ET DE SES CONTRAINTES

Alors, le mouvement renonce à placer son imaginaire, et son voeu, et sa pensée, et la pensée de son action dans la contrée du temps libre et de l'activité voulue.

« Alors, dit Jean-Louis Sagot-Duvauroux, « la pensée et l'action se ré-axent autour du travail et de ses contraintes.

« Par exemple, dit-il, un des effets les plus bénéfiques du mouvement ouvrier occidental tient dans l'anoblissement des classes laborieuses, ce retournement symbolique qui amène les prolétaires d'avant la grande crise de la fin du 20ème siècle à revendiquer fièrement leur condition et, le faisant, à provoquer le respect.

« Mais cet anoblissement ne s'opère pas en magnifiant leur capacité à la libre activité qui, dans l'Ancien Régime, distinguait les aristocrates de manants ; Il s'enracine dans les « valeurs » du travail et l'endurance à la peine.

« Travailleuses ! Travailleurs !... »

Et pourtant !


ET POURTANT

« Et pourtant, poursuit Jean-Louis Sagot-Duvauroux, nous qui sommes désormais presque tous des salariés, quand nous rentrons en nous-mêmes, nous retrouvons sans peine le continent des évidences portées par le vieux mot d'ordre libertaire d'abolition du salariat.

« Nous nous assurons facilement de pouvoir développer des activités utiles en dehors de la hiérarchie patronale. Nous partageons sans trop nous gratter la cervelle la conviction qu'un être humain n'est pas fait pour servir de rouage dans la mécanique, mais pour penser et diriger ses mécanismes...

« C'est chaque jour et d'une démarche assurée que nous franchissons les postes frontières disposés par l'histoire humaine entre le travail contraint et la libre-activité, entre les gestes mécaniques et l'action créatrice.

« A des degrés divers, nous savons tous nous mouvoir dans les deux univers.

« La frontière entre l'un et l'autre est-elle fixée à jamais ? »


ÉLARGIR LES TERRITOIRES LIBÉRÉS

Les territoires libérés peuvent-ils s'élargir et dans quelles conditions ?

Pour répondre il faut, dit Sagot-Duvauroux, sortir de l'obnubilation provoquée par le travail sur les lignées communiste, socialiste ou syndicale du mouvement d'émancipation et ré-observer très simplement le paysage en nous souvenant qu'il n'est pas fait d'un seul tenant.

Sous le pouvoir du capital, l'exploitation du travail s'exerce par la cession marchande de ce que Marx a appelé la force de travail. Quand l'employeur achète le potentiel qu'elle constitue ce n'est encore qu'une marchandise virtuelle qui va s'inscrire dans la réalité sous forme de travail. Et tout travail se réalise dans le temps. Le temps de travail devient ainsi la mesure de toute richesse marchande.


LA BOULIMIE DU CAPITAL

D'où la boulimie du capital : toujours davantage d'humains rendus disponibles à l'enrôlement dans la salariat et, dans chaque existence, toujours davantage de temps rendu disponible au travail salarié. Et l'emprise capitaliste sur le temps humain n'est pas seulement seulement quantitative, elle vise un ensemble de potentialités, de qualités, de compétences...

D'où également les résistances qui imposent lois et conventions limitant le temps de travail et imposant le respect des qualifications...

Pour Jean-Louis Sagot-Duvauroux, « le modèle du salarié exploité, c'est désormais ce héros qui, l'oeil fixé sur la courbe des profits faits pour d'autres, repousse les limites du possible dans le dépassement perpétuel et la réinvention permanente de soi...Le capitalisme contemporain réinvente le plus efficace des knouts : le trafic des identités personnelles, la manipulation narcissique au service du rendement, le gouvernement par l'image de soi. Et pour les récalcitrants, le placard ou la porte. »


DE NOUVELLES FORMES D'ASSUJETTISSEMENT

Et, dans les dernières évolutions, de nouvelles formes d'assujettissement : le travailleur ne serait plus figuré sous le statut ancien de salarié, mais comme un individu naturellement libre d'entreprendre, un investisseur placé dans la concurrence des capitaux, une entreprise unipersonnelle.

Pour Jean-Louis Sagot-Duvauroux, « dans cette compétition, le travailleur se présente avec comme seul « capital » son corps nu et éventuellement ses compétences techniques, et d'autres avec plusieurs millions de dollars de chiffre d'affaires, mais tous seraient des entreprises libres d'entreprendre et de commercer dans un marché de libre concurrence. A la subordination directe du salarié se substitue un rapport de vassalisation entrepreneurial. Le contrat de travail disparaît au profit d'un contrat d'allégeance...Il y a bien là quelque chose qui ressemble au dépassement du salariat mais c'est pour tomber dans une aliénation pire encore. Ce qui est transformé en marchandise, ce n'est plus le seul temps de travail, c'est l'existence même de l'être humain. Soi comme capital. D'ailleurs on voit réapparaître aussi l'esclavage pur et simple, aux marges pour l'instant, dans certains ateliers clandestins ou avec certaines formes de prostitution forcée. Soi comme marchandise... »


DÉMARCHANDISER LA PERSONNE

Ce cauchemar dessine en creux ce qu'est, dans son contenu concret, l'émancipation de l'activité humaine, ses liens profonds avec des institutions longtemps portées par le mouvement populaire.

« Il nous fait toucher du doigt, dit Jean-Louis Sagot-Duvauroux, la nécessité de penser l'émancipation de l'activité en même temps que la démarchandisation de la personne : je ne suis pas une entreprise, mon potentiel d'activité n'est pas une marchandise, ma personne, mon corps, ne sont pas un capital, ma vie n'est pas destinée. »

Il nous convainc que la liberté ne va pas sans solidarité : non pas la concurrence de tous contre tous et au bout du compte la loi du plus fort mais la libre association pour être forts ensemble face au, capitalisme, et demain peut-être sans lui.

« Alors, dit Jean-Louis Sagot-Duvauroux, il est possible de lire dans l'histoire du temps humain des raisons de s'engager dans son émancipation vraie... »


LIRE L'ÉMANCIPATION DANS L'HISTOIRE DU TEMPS HUMAIN

Jean-Louis Sagot-Duvauroux rappelle que, dès ses premiers textes et ses premiers programmes, le mouvement ouvrier, qui se place sous la double invocation du communisme et du socialisme, met donc au premier rang de ses objectifs la diminution du temps de travail contraint et prend comme horizon l'abolition, du salariat. Ses réussites ont été spectaculaires. Dans les pays industrialisés, elles ont véritablement transformé l'existence du grand nombre.

« Grâce, dit-il, à l'action syndicale et politique des salariés, des gains de productivité ont pu être consacrés à la diminution du temps de travail au lieu d'être engloutis dans les profits du capital.

« L'élargissement du temps libre s'est accompagné d'inventions sociales hautement civilidées qui solidarisent en profondeur la société... »

Il cite, s'agissant de la France, l'école obligatoire et gratuite, l'assurance sociale contre le chômage, la retraite par répartition, les congés payés...

« Les circuits capitalistes ont ainsi perdu l'usage de fux d'argent considérables. Une part importante du temps humain a cessé d'être utilisable pour la valorisation du capital. Le temps libéré a changé de signification. Naguère consacré à la récupération des forces et comme satellisé par le temps de travail contraint, il est désormais suffisant pour que les salariés puissent le consacrer aux loisirs et à la libre activité...

« Une part importante du temps libéré s'investit dans la vie associative, la culture, les arts, la vie affective.

« Ces premiers espaces partagés de libre activité et de temps gratuit, même fragiles, en recul parfois, menacés, dessinent la possibilité d'un changement radical de la civilisation. »


UN CHANGEMENT RADICAL DE CIVILISATION

Pour Jean-Louis Sagot-Duvauroux, l'émancipation ne se fixe pas de bornes dans la libération du temps humain.

Mais elle s'oppose à la conduite capitaliste de l'économie qui use de ces progrès pour accumuler sans fin les marchandises et les capitaux sans bénéfice pour la liberté du plus grand nombre...

Les trente-cinq heures sont mieux que les trente-neuf ou les quarante-huit heures, mais elles ne sont pas la fin de l'histoire.

Les partisans de l'émancipation impulsent un nouveau rapport culturel des êtres humains à leur temps de vie et à l'activité qu'ils y déploient...

Ils méprisent et combattent tous les dispositifs qui conduisent à évaluer monétairement notre temps, notre potentiel d'activités et finalement notre personne, à en faire commerce en bloc ou par morceaux, comme salarié, comme « prestataire » ou comme esclave.

Ils trouvent très raisonnable et très bénéfique de reconnaître à notre existence un caractère inaliénable, non pas de temps en temps, mais toujours.

Jean-Louis Sagot-Duvauroux conclut là cette fenêtre.


LA DÉMOCRATIE INDISPENSABLE

Je dois cependant souligner qu'au passage, il avait montré que la question des libertés politiques et de la démocratie est directement concernée.

« Le partage actuel du temps libre et du temps sous contrainte réserve de fait les fonctions de gouvernement à des politiciens professionnels disposant seuls du temps et des moyens financiers nécessaires pour se consacrer aux joutes électorales. Le plus grand nombre est ainsi conduit à se décharger de ses responsabilités civiques sur une petite oligarchie d'aspirants gouvernants. Le goût du pouvoir et les habitudes contractées dans son exercice finissent alors par apparaître comme des compétences indispensables au bon fonctionnement de la cité. »

Il y a là aussi certainement une frontière à travailler.


Les cinq autres frontières explorées sont les suivantes :

  • Frontière entre le libre accès aux biens et leur accaparement par certains.

  • Frontière entre la libre jouissance et l'aliénation marchande.

  • Frontière entre le libre choix et la coercition.

  • Frontière entre la libre association et l'aliénation à des pouvoirs hétéronomes.

  • Frontière entre la libre rencontre et les oppressions identitaires.


Dans une deuxième partie, Jean-Louis Sagot-Duvauroux définit en sept « projets » les conditions d'une émancipation effective.

L'ensemble est mis à libre disposition sur internet où il est placé sous une licence « creative commons » de type « open source ou copyleft. »

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