Joëlle Ceccaldi-Raynaud, député-maire de Puteaux (UMP) et proche de Nicolas Sarközy, mise en cause dans une affaire de pots-de-vin relayée par Le Canard enchaîné, a demandé à son équipe d'acheter tous les exemplaires de l'hebdomadaire en vente dans la ville, ont affirmé jeudi un élu d'opposition et un journaliste du Canard. « Non seulement la maire de Puteaux a fait acheter la quasi-intégralité des 600 exemplaires du Canard enchaîné mis en vente mais celle-ci fait régner un climat de peur sur les kiosquiers, certains d'entre eux refusant d'être réapprovisionnés en raison d'éventuelles représailles », affirme le journaliste du Canard Hervé Liffran, confirmant une information révélée par le blog du conseiller municipal d'opposition Christophe Grébert (Modem) .
« Les kiosquiers ont reconnu des personnes de la mairie. L'un d'entre eux m'a assuré qu'en cas de nouvelle livraison, il mettrait les nouveaux exemplaires sous son comptoir et les renverrait la semaine prochaine pour invendus » a ajouté M. Liffran. Selon le journaliste, c'est une "première" dans l'histoire de l'hebdomadaire satirique. « Nous avons déjà vu des villes acheter un maximum d'exemplaires mais jamais elles n'ont cherché à empêcher le réapprovisionnement », a ajouté Hervé Liffran.
Dans son édition parue mercredi, l'hebdomadaire français Le Canard Enchaîné accuse Joëlle Ceccaldi-Raynaud d'avoir caché au Luxembourg, et dans les îles vierges britanniques, au moins quatre millions d'euros d'origine inconnue jusqu'à 2009. Le journal détaille que la proche de Nicolas Sarközy a ouvert en septembre 1996 un compte à la banque privée Edmond de Rothschild, au Luxembourg, au nom d'une société basée aux îles Vierges britanniques, un paradis fiscal.
"L'ex-suppléante de Sarko planquait son magot dans des paradis fiscaux" titre le Canard du 19 octobre. La maire aurait donc sorti les grands moyens. Contacté par Rue89, un diffuseur de Puteaux (qui préfère rester anonyme) raconte. Un homme a poussé la porte peu après l'ouverture. Et a fait chauffer sa carte bleue pour emporter la pile de 85 exemplaires. Facture : 102 euros, à raison de 1,20 euro Le Canard.
Son opposant politique, Christophe Grébert, a organisé une distribution gratuite pour les Putéoliens privés de Canard Enchaîné samedi à 16h devant le Monoprix de Puteaux, à deux pas de la mairie. Une opération qu’il a baptisée : "Un Canard pour chaque Putéolien".
L'instruction judiciaire ouverte à Nanterre pour corruption et abus de biens sociaux est liée à l'attribution d'un marché par le syndicat intercommunal de chauffage urbain de la Défense (Sicudef) à la société Enerpart, créée pour l'occasion par trois associés Jean Bonnefont, ex-dirigeant de Charbonnage de France, Bernard Forterre ex-dirigeant de Vivendi et Laurent Gimel. Enerpart était en concurrence avec d'importants groupes tels que EDF ou Dalkia.
Dans cette affaire, le père de l'élue, l'ex-sénateur-maire UMP de Puteaux, Charles Ceccaldi-Raynaud, avec lequel elle est en conflit ouvert depuis plusieurs années, a été mis en examen en 2007 pour "favoritisme, recel d'abus de biens sociaux et corruption passive". Selon Le Canard Enchaîné, dans le cadre de cette enquête, Charles Ceccaldi-Raynaud a accusé sa fille d'avoir touché des commissions occultes. « Dans cette affaire qui m'est étrangère, je ne puis que regretter le déballage médiatique d'une relation familiale traumatisante pour mes enfants et moi-même, qui me conduit à réfléchir sérieusement à la mise en place d'une mesure judiciaire de protection » a-t-elle affirmé, sans donner plus de précisions.
En août dernier, Joëlle Ceccaldi-Raynaud avait été entendue comme témoin assisté par Richard Pallain, juge d'instruction de Nanterre chargé de l'enquête sur les malversations financières liées à l'attribution du marché du chauffage de La Défense.
En septembre 2010, le juge a lancé une commission rogatoire au Grand Duché. Il en ressort que Joëlle Ceccaldi-Raynaud a effectivement ouvert un compte au Luxembourg en 1996 sur lequel ont transité d'importantes sommes via des paradis fiscaux. En 2005, le compte contenait plus de 4 millions d'euros. Ces comptes portaient également les noms de ses enfants, Emilie et Vincent Franchi.
Mais en avril 2009, les comptes sont brusquement fermés et l'argent est "transféré vers une destination inconnue", écrit le Canard.
Devant le juge, Joëlle Ceccaldi-Raynaud a nié que cet argent provenait de commissions occultes. Selon elle, il s'agit de "fonds qui se trouvaient en Suisse et qui appartenaient à sa grand-mère" . Ce que Charles Ceccaldi-Raynaud, bien décidé à torpiller la défense de sa fille, a démenti au juge, déclaration de succession à l'appui. Selon Charles Ceccaldi, sa fille n'a pas touché un tel héritage. L'origine de cet argent resterait donc mystérieuse.
L'enquête judiciaire en reste là pour l'instant... car le juge Pallain a été muté le mois dernier du tribunal de Nanterre à... Tahiti !
Contacté par un journaliste du Canard, la député-maire UMP de Puteaux a refusé de répondre à ses questions.
Sources : Le Canard Enchaîné, Le Monde, le blog de Christophe Grébert, Rue89