Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le blog satirique du Papy Mouzeot

Le juge Courroye "hors la loi" mis en examen

Courroye Hors-la-loi 

 

C’est à la fois une mauvaise nouvelle de plus pour Sarközy et un séisme pour le monde judiciaire. Le procureur de la République de Nanterre, Philipe Courroye, réputé proche du président de la République, a été mis en examen mardi 17 janvier, dans le cadre de l'enquête dite des "fadettes". Le juge est soupçonné d'avoir tenté de découvrir qui informait illégalement, en 2010, des journalistes du Monde travaillant sur l'affaire Bettencourt, en réclamant leurs factures téléphoniques détaillées, communément appelées "fadettes".

 

La mise en examen du procureur de Nanterre avait déjà été évoquée début décembre.  La Cour de cassation avait clairement épinglé le haut-magistrat et reconnu qu'il avait bafoué "la loi". De fait, la procédure qu'il avait ouverte censée identifier les auteurs des fuites dans l'affaire Bettencourt a été annulée.

 

La Cour de cassation après avoir conclu à une violation du secret des sources des journalistes avait considéré ainsi :

"L'atteinte portée au secret des sources des journalistes n'était pas justifiée par l'existence d'un impératif prépondérant d'intérêt public et la mesure n'était pas strictement nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi".


http://img15.hostingpics.net/pics/481141courroyesarkozy.jpg


C'est la Courroye de transmission
de l'Élysée qui vient de céder

http://a35.idata.over-blog.com/400x543/4/16/26/23/Album/Sarkozy-Prevost-Desprez.jpgLa nomination en force de Courroye à la tête du parquet de Nanterre, siège d’affaires sensibles, passé en force malgré deux avis négatifs du Conseil supérieur de la magistrature, ses mondanités gênantes et sa lutte à mort avec son ancienne collègue Isabelle Prévost-Desprez l’écartent du poste de procureur de Paris promis par Sarközy.

En pleine affaire Bettencourt, le procureur de Nanterre, Philippe Courroye, avait adressé aux enquêteurs "des réquisitions" afin d'identifier les sources de Gérard Davet et Jacques Follorou, après des fuites dans Le Monde au sujet d'une perquisition ordonnée par la juge Isabelle Prévost-Desprez.

Il y a pourtant des principes sur lesquels nul ne saurait transiger. La liberté de la presse et l'une de ses conditions principales, le secret des sources des journalistes, en font partie. Le gouvernement Fillon l'avait rappelé de façon solennelle en faisant adopter, le 4 janvier 2010, une loi disposant que "le secret des sources des journalistes est protégé dans l'exercice de leur mission d'information".

Selon le journal Le Monde, ce principe a été bafoué à deux reprises au moins dans le cadre de l'affaire Woerth-Bettencourt : lorsque le procureur de la République de Nanterre, Philippe Courroye, et le directeur central du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, ont cherché à connaître, par l'analyse de leurs factures téléphoniques l'origine des informations publiées par les journalistes du Monde. Dans ces deux dossiers,  Le Monde a déposé plainte. Après Squarcini, la juge d'instruction a estimé, mardi 17 janvier, qu'il existait des charges suffisantes pour mettre en examen, à son tour, le juge Courroye, soupçonné d'avoir violé le "secret des correspondances" et collecté des "données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite". La Cour d'appel de Bordeaux avait déjà jugé, il y a quelques semaines, illégale l'enquête du procureur. La Cour de Cassation avait, pour sa part, estimé disproportionnée l'atteinte au secret des sources.


http://img15.hostingpics.net/pics/290169bernardsquarcini.jpgDans un autre volet de cette affaire d'espionnage de journalistes du quotidien, la juge Zimmermann avait déjà mis en examen en octobre le patron du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, un proche du chef de l'Etat. Son supérieur, le directeur général de la police nationale (DGPN), Frédéric Péchenard, avait quant à lui été entendu sans être judiciairement mis en cause. En septembre, Fréderic Péchenard avait assumé avoir demandé au contre-espionnage "d'identifier le haut-fonctionnaire qui, soumis au secret professionnel et ayant un accès direct à des documents confidentiels, divulguait des informations confidentielles sur une affaire judiciaire en cours". Il n'a pas été inculpé. En dépit de sa mise en cause, le chef du contre-espionnage Bernard Squarcini n'a pas été suspendu de ses fonctions.

 

Ce que Bernard Squarcini a dit à la juge

Dans ce dossier, tout semble indiquer que, sur ordre des autorités politiques, Squarcini a géré directement la procédure. « Je fais ce que l'on me dit de faire avec les outils que l'on me donne », a concédé, sur procès-verbal, M. Squarcini. Le 17 juillet 2010, il se trouve en Corse, dans son village, et s'apprête à assister à un mariage, lorsqu'il est destinataire d'un appel téléphonique : « Je reçois un coup de fil sur mon portable du DGPN (Frédéric Péchenard) vers 13 heures. Il me fait part d'un article du Monde qui vient de sortir et que je n'ai pas lu ». Selon Squarcini, il est question d'un "circuit court", les fuites ne pouvant provenir, selon Péchenard, que de "la brigade financière, du parquet général de Versailles, de la DACG (direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice) et du cabinet de la chancellerie".

Les deux hommes s'entendent sur un modus operandi, mis en place à Paris avec l'adjoint de M. Squarcini, Frédéric Veaux : « Etant donné que les soupçons pèsent sur cette chaîne et qu'on est en présence de personnes exerçant de hautes responsabilités, nous décidons d'un commun accord de faire une vérification technique sur les fadettes de M. Davet sur quatre jours uniquement ».
Le jour même, Squarcini appelle son adjoint, Frédéric Veaux, resté à Paris. Entendu, lundi 10 octobre, comme témoin assisté, par la juge Zimmermann, M. Veaux relate l'épisode :
« Le samedi 17 juillet 2010, je me trouvais au bureau (…) le directeur central, Bernard Squarcini, était absent de Paris, et j'ai donc reçu un appel téléphonique de sa part à propos de cette affaire. Il a fait état d'un appel téléphonique qu'il avait reçu de la part du directeur général de la police nationale, à propos de la divulgation de documents confidentiels. D'un commun accord, nous avons convenu qu'il était plus prudent de partir de celui qui assumait en “une” du quotidien le fait d'avoir eu en sa possession ces documents ». Il a ajouté, au risque de se contredire lui-même : « Pour autant, il ne s'agissait pas de s'intéresser aux sources du rédacteur, mais bien à la divulgation de documents ».

Frédéric Veaux a indiqué que Squarcini lui avait communiqué les coordonnées téléphoniques de M. Davet, il avait donc connaissance de la qualité de journaliste de ce dernier. «  Autrement dit, l'a interrogé la juge, il s'agissait d'enquêter sur une violation du secret de l'enquête ? » , ce qui aurait supposé l'ouverture d'une procédure judiciaire. « Non, a répondu le policier, cela ne correspond pas aux missions qui sont confiées à la DCRI ».
Dès le 17 juillet 2010, Squarcini, selon ses déclarations, cible David Sénat, alors conseiller de la garde des sceaux, comme étant l'auteur des fuites.
« Comment avez-vous pu apporter la preuve qu'il s'agissait de M. Sénat ? », l'interroge la juge, précisant que lors de son appel, Frédéric Péchenard n'aurait pas mentionné ce nom.   « Je sais à peu près qui donne quoi aux journalistes… » , répond Squarcini, qui ajoute : « David Sénat confirmera son rôle dans le livre Sarko m'a tuer où il déclare être chargé de donner des PV à la presse pour déstabiliser certaines personnes. En résumé, j'avais un soupçon sur M. Sénat… »

 

Accroché comme une moule à son rocher

http://img15.hostingpics.net/pics/910988courroye.jpg« La question de ma démission ne se pose pas. Je peux vous annoncer que le 25 avril 2014, je ne serai plus le procureur de Nanterre car je serai atteint par la règle des sept ans ! », a ironisé Philippe Courroye. « Je vais continuer à travailler comme je l'ai toujours fait » a-t-il insisté, dénonçant une « véritable chasse à l'homme ».

Philippe Courroye a "immédiatement déposé" deux recours auprès de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris. « Cette mise en examen est, au regard du fonctionnement de la Justice, d'une extrême gravité puisqu'elle touche au pouvoir d'enquête du procureur de la République, mission qu'il exerce, aux termes de la loi, au service de l'intérêt général » a ajouté le magistrat.

Si rien ne contraint le procureur Courroye à démissionner, le CSM peut, à l'initiative du garde des Sceaux ou du procureur général - ici celui de Versailles - être saisi en urgence d'une demande "d'interdiction temporaire d'exercice", en attendant une décision définitive sur la procédure judiciaire et l'action disciplinaire.

Cette série de décisions judiciaires témoigne des menaces qui pèsent sur la liberté de la presse lorsque le pouvoir politique ou des autorités judiciaires décident d'utiliser des moyens illégaux. L'espionnage des journalistes, même s'il prétend s'appuyer sur une supposée défense de "l'intérêt national" est inadmissible. La protection des sources ne constitue pas un privilège mais "une des pierres angulaires de la liberté de la presse", rappelle la Cour européenne des droits de l'homme. Le journal Le Monde poursuivra donc son travail d'enquête dans tous les domaines et luttera pour que le droit en matière de secret des sources soit précisé et respecté.
Le Monde déposera donc plainte dans un troisième dossier, celui qui a vu le Parquet de Marseille se procurer, dans le cadre d'une affaire criminelle, les fadettes de leurs journalistes.

 

Notons que ces poursuites viennent s’ajouter à celles qui visent déjà d’autres amis du chef de l’Etat (comme Nicolas Bazire ou Thierry Gaubert) dans des affaires de commissions occultes sur des ventes d’armes (dossiers Takkiedine/Karachi).
Du point de vue judiciaire, la fin de règne de Sarközy n’a plus grand chose à envier à celle de Jacques Chirac.


http://img15.hostingpics.net/pics/918642sarkocourroye.jpg


Un pavé dans la marre

http://img15.hostingpics.net/pics/188397enquetecourroye.jpgDans son “Enquête sur un juge au-dessus de tout soupçon”, le journaliste Airy Routier décortique la carrière du magistrat le plus critiqué de France. Pour Airy Routier, Courroye est aujourd’hui “un magistrat déstabilisé, qui a perdu son aura et cherche à la reconquérir ainsi que la faveur du prince”. L’auteur concède qu’il a “encore un avenir”, et pourrait être chargé de l’affaire d’espionnage industriel chez Renault. Mais “il a subi une humiliation importante” et la hiérarchie se désolidarise. Marqué à droite, Philippe Courroye a su se faire belliqueux ou courtisan, selon les circonstances. A force d’opportuns dîners en ville, draguant ceux qu’il avait autrefois mis en examen, le petit bourgeois lyonnais est devenu notable parisien décoré de la Légion d’honneur. La presse le pointe aujourd'hui comme le symbole du parquet aux ordres, ami du pouvoir. Ce livre, en redonnant son unité à un parcours quitte à défendre tous ceux qu’il a attaqués, ne l’aidera pas à sortir la tête de l’eau.

 

 

 

 

 

Source : LeMonde.fr, lesinrocks.com

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :