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Le blog satirique du Papy Mouzeot

Pour la peau d'un flic : l'affaire Patrick Cahez

Pour la peau d'un flic

Combien vaut la peau
d'un policier français ?

 

 

http://img15.hostingpics.net/pics/357607LesBrigadesduTigre.jpgLes flics, on aime ou on aime pas. On aime le côté "servir et protéger" mais on apprécie nettement moins le rôle du percepteur qui flashe nos véhicules lorsque nous effectuons des dépassements de vitesse, d'autant plus que ces photos sont de très mauvaise qualité et sont hors de prix !


L'histoire qui va suivre aurait tout d'un mauvais polar si elle n'était pas réelle. Mais avant de rentrer dans le vif du sujet il est important de retenir qu'on embrasse pas une carrière de policier comme on décide de devenir plombier. Pour en avoir parlé à plusieurs reprises avec quelques flics de la "P.J" de Montpellier, on devient policier, notamment à la DCPJ, avant tout par dévouement. J'avoue que malgré les discours passionnés que j'ai eu l'occasion d'entendre, j'ignore encore ce qui peut pousser un individu à consacrer sa vie entière, au péril de sa vie, pour défendre les citoyens contre la criminalité. Quand je dis "consacrer sa vie entière", il n'y a rien d'exagéré. Quasiment peu ou pas de vie de famille, des horaires plus que fluctuant, des heures supplémentaires jamais payées voire aussi non récupérées en temps de repos compensatoire, car à la "P.J", le repos ça n'existe pas.

Cette division, peu importe le territoire qu'elle occupe, est toujours sur le pied de guerre. Si dans la théorie la DCPJ est chargée de conduire les investigations et les recherches, sur le terrain le champ d'application est beaucoup plus vaste. Ça peut aller de la disparition inquiétante d'une personne jusqu'à la cyber-criminalité, en passant par la lutte contre le proxénétisme, le trafic de stupéfiants, d'armes, de véhicules volés, les escroqueries internationales, la contrefaçon et la fausse monnaie et même le terrorisme ! Tout ça pour un salaire qui avoisine 2 000 euros nets mensuels avec la possiblité de parvenir à un traitement d'environ 3 000 euros, pour ceux qui arrivent entiers jusqu'au bout de leur carrière...

 

 Le début d'un engrenage infernal

 

http://img15.hostingpics.net/pics/340968patrick.jpgL'affaire qui nous intéresse plus particulièrement concerne l'ex-lieutenant de police Patrick Cahez de la DCPJ grenobloise. Ne cherchez pas, vous n'en n'avez pas entendu parler à la télévision ni même dans la presse nationale car les seuls à dénoncer le combat de cet officier de la P.J. de Grenoble officient une fois de plus chez Mediapart. A croire que ce site d'information est le seul "empêcheur de tourner en rond" face aux innombrables responsables d'injustices qui sévissent quasi impunément dans notre pays.

Patrick Cahez, mis au placard depuis 2003 par sa hiérarchie, se bat contre son administration et nous dévoile le portrait peu enchanteur d'une maison poulaga capable "de violence symbolique allant jusqu’au rejet physique, dès lors qu’elle se sent déstabilisée par l’un de ses membres".

Affecté à la brigade financière de la P.J. de Grenoble, l'officier de police a été empêché de travailler pendant plusieurs années. « Suite à un changement de direction, c’était devenu l’enfer. A titre d’exemple, on m’avait supprimé mon ordinateur et ensuite mon chef me demandait d’expliquer par écrit pourquoi j’avais du retard dans mes dossiers » explique-t-il aux journalistes de Mediapart. Un comble pour une ville livrée aux mains des dealers (lire l'article du Figaro : Les caïds de cité succèdent aux Italo-Grenoblois). Mais que reproche-t-on à cet ancien délégué syndical départemental de Synergie officier et administrateur la CFE-CGC de l'union départementale de l'Isère, pour l'avoir exclu de son service et privé d'activité malgré des états de service irréprochables confirmés par le ministre de l'Intérieur de l'époque ?

Le lieutenant Patrick Cahez a usé de son droit d'alerte pour informer la hiérarchie, jusqu'au ministre, des dysfonctionnements au sein de la police judiciaire à Grenoble. Outre son combat personnel après avoir déposé plainte contre X... pour harcèlement moral, cet officier de la P.J. a osé briser l'omerta qui règnait au sein de son service, ce qui n'est pas du tout du gôut de ses supérieurs hiérarchiques ni même de celui du parquet général de Grenoble. A la maison poulaga on lave son linge sale en famille !


Alors même que le ministère public refusait de donner suite aux plaintes et faisait paradoxalement condamner Patrick Cahez pour dénonciation calomnieuse, un fonctionnaire s'est suicidé et une fonctionnaire a fait une tentative dans le service de police judiciaire de Grenoble.

C'est le début d'un engrenage infernal qui conduira Patrick Cahez jusqu'à la dépression morale.

La plainte contre X déposée par les avocats de Patrick Cahez

 

 

10 ans de lutte sans relâche face à une hiérarchie impitoyable

 

Voici ce que nous relate le site d'information Mediapart suite au renvoi de Patrick Cahez devant le tribunal correctionnel de Grenoble cette semaine, pour violation du "secret professionnel".

     

http://img11.hostingpics.net/pics/332109Mediapart.png

 

En congé longue maladie depuis 2007 pour dépression, Patrick Cahez, un officier de police, se bat en vain depuis des années pour faire reconnaître par le ministère de l'intérieur le caractère professionnel de sa maladie. C'est un combat kafkaïen dont cet ancien de la police judiciaire de Grenoble tient le journal exhaustif sur un blog : il y publie tous ses échanges avec l'administration ainsi que les décisions de justice le concernant.


http://img11.hostingpics.net/pics/919712CahezBlog.jpgCliquez sur l'image pour atteindre le blog de Patrick Cahez

 

Ce blog est un site d'archivage et de liens utiles à l'usage des avocats du fonctionnaire. Il contribue à la défense des droits fondamentaux et des intérêts collectifs.

 

C'est ce qui lui vaut son renvoi ce 24 janvier devant le tribunal correctionnel de Grenoble pour violation du secret professionnel. Il lui est reproché d'avoir publié début 2008 sur son blog "une note de service décrivant l'organisation de l'antenne PJ de Grenoble avec la liste des fonctionnaires de police et des véhicules de service". En conflit avec son administration, Patrick Cahez cherchait à prouver sa mise au placard au sein du service. La note en question, datant de juin 2007, détaille la répartition de la vingtaine de fonctionnaires de la PJ de Grenoble, tous affectés à un groupe à l'exception notable de Patrick Cahez. Ce dernier est mis à part dans une catégorie à l'intitulé aussi vague (« rattaché au chef de service et à son adjoint ») que sa mission supposée.

Problème : le policier a ainsi rendu publics les noms de ses collègues, les marques et l'immatriculation des véhicules utilisés, les rendant identifiables lors d'une surveillance ou filature. Depuis lors, la note de service (ci-dessous), toujours en ligne, a été anonymisée.

 

Sans attendre la décision de la justice, Claude Baland, le directeur général de la police nationale, a déjà sanctionné le 10 janvier Patrick Cahez à un abaissement d'échelon pour les mêmes faits. Dans cet arrêté, le patron de la police indique que la publication de la note de service risquait « de perturber le bon fonctionnement de ce service de police sensible, voire de mettre en difficulté, sinon même en péril, les personnels qui y sont encore en poste ». Il reproche également à l'officier d'avoir publiquement mis en cause sur son blog l'ancien procureur de Lyon, ainsi que ses anciens supérieurs.

Pour son avocat, Maître Gilles Devert, la note en question ne relève en rien de la violation du secret professionnel, censé selon lui protéger avant tout les particuliers contre la divulgation d'informations concernant leur intimité et vie privée. C'est-à-dire, par exemple, contre le médecin qui révélerait la maladie d'un patient, ou l'avocat qui répéterait à des tiers les confidences de son client. « L'idée du droit français que les services publics devraient être plus protégés que les particuliers est remise en cause par toute la jurisprudence de la Cour européenne », estime Maître Gilles Devert.

« De plus, la note est publiée sur un blog qui est un organe de presse, poursuit l'avocat. Ces éléments participent à un débat d'intérêt général sur le fonctionnement de la police. Savoir si la police marche bien ou pas relève du débat public. C'est très intéressant pour la démocratie que des blogs de policiers existent, d'autant que l'administration a tout à fait les moyens de répondre. »

Généralement, les poursuites pour violation du secret professionnel visent des policiers soupçonnés d'avoir monnayé des informations confidentielles extraites des fichiers de police, des renseignements de main courante, ou encore des procédures judiciaires en cours. Ce qui n'est pas le cas de Patrick Cahez. Dans La Tribune du commissaire en 2008, Martial Berne, commissaire alors en poste à l'IGS (la police des polices parisienne) expliquait : « Les autorités judiciaires engagent exceptionnellement des poursuites pour des faits d’atteinte au secret professionnel concernant des policiers lorsqu’ils ne s’accompagnent pas de contreparties. Encore s’agit-il le plus souvent d’un rappel à la loi… »

http://img15.hostingpics.net/pics/474520STIC.jpgCe genre de poursuite pour violation du secret professionnel a déjà été utilisé pour tenter de museler un officier de police trop remuant, l'ex-commandant Philippe Pichon. En décembre 2011, le tribunal administratif de Melun a confirmé sa mise à la retraite d'office, à l'âge de 42 ans, pour avoir transmis à la presse les fiches Stic (système de traitement des infractions constatées) de Johnny Hallyday et de Jamel Debbouze.

L’officier avait revendiqué cet acte comme un geste citoyen, effectué en dernier recours, après avoir tenté en vain d'alerter sa hiérarchie et le procureur sur les usages illégaux du plus gros fichier de police. Là encore, le ministère n'a pas attendu son procès, qui n'aura lieu en septembre 2013, pour le sanctionner par une mise à la retraite d'office.

«Ne pas nuire à la considération de la police nationale et de la gendarmerie nationale»

Patrick Cahez est, quant à lui, devenu indésirable pour avoir déposé plainte contre X... en septembre 2003 pour harcèlement moral au sein de son service. Sans nier les faits dénoncés (retrait de son ordinateur, menaces de sanctions injustifiées, expertises médicales à répétition, refus de demandes de repos récupérateur à la suite d'une blessure, insultes, etc.), le tribunal correctionnel de Grenoble avait considéré qu'ils ne faisaient "que traduire le pouvoir de direction et de contrôle de tout employeur"  et prononcé un non-lieu en novembre 2006. Ses supérieurs s'étaient ensuite retournés contre l'officier et avaient obtenu en août 2007 sa condamnation pour dénonciation calomnieuse par le même tribunal.

L'officier tombe alors en dépression. Plusieurs experts, dont le médecin inspecteur régional de la police lui-même ainsi que la psychiatre Brigitte Font Le Bret, experte auprès de la cour d'appel de Grenoble, attestent que cette dépression a été provoquée par un "harcèlement professionnel", dans un petit service qui a connu deux suicides ainsi qu'une tentative en dix ans. En vain. Le ministère de l'intérieur refuse de reconnaître le caractère professionnel de sa dépression. Et s'acharne contre l'officier.

Fin 2010, un policier de la direction zonale du renseignement intérieur (DZRI) de Lyon signale à l'inspection générale de la police nationale (IGPN) la présence sur un blog belge, identifié comme celui de l'officier Patrick Cahez, de la fameuse note de service. Une enquête préliminaire est aussitôt ouverte par le procureur de la République de Grenoble de l'époque et confiée à l'IGPN, qui engage parallèlement une enquête disciplinaire sans en avertir le fonctionnaire.

Depuis début 2011, plusieurs commissaires de l'IGPN épluchent la vie du lieutenant de police, qui vit aujourd'hui à Bruxelles, à la recherche du moindre faux pas. Identification de son adresse mail et de son adresse IP auprès de Google puis de son fournisseur d'accès Internet, vérifications de ses diplômes auprès des universités concernées, de ses relevés d'imposition, de l'emploi et des revenus de sa fille et de son épouse en Belgique : toute sa vie privée a été passée au peigne fin par la police des polices.

Le procureur de la République de Grenoble de l'époque ira jusqu'à recommander l'inscription de l'officier au fichier des personnes recherchées, tandis que l'IGPN saisissait Interpol afin de faire remettre à Patrick Cahez une convocation à Paris pour audition. Une saisine jugée "injustifiée et donc disproportionnée" par l'avocat belge Alexis Deswaef, depuis devenu président de la Ligue des droits de l'homme belge.

Dans un courrier daté du 28 juillet 2011, ce dernier a rappelé au ministère de l'intérieur que « les conventions signées par la Belgique en matière d'entraide policière sont limitées aux infractions relevant de la criminalité organisée ». Et s'est indigné de ce que le ministère de l'intérieur français persiste « à inquiéter un ancien délégué syndical que l'administration sait malade, placé en congé longue durée du fait de cette maladie et domicilié à Bruxelles pour raisons thérapeutiques ».

Entre-temps, le 22 octobre 2012, le comité médical du secrétariat général pour l'administration de la police (Sgap) de Lyon a déclaré l'officier "inapte" et a recommandé sa mise en retraite pour invalidité. Une façon discrète pour l'administration de se débarrasser d'un officier qui dérangeait. Le 17 décembre 2012, un autre policier, qui avait rué dans les brancards, a également été écarté au même motif : inaptitude.

Il s'agit du CRS Laurent Cuenca, qui avait été sanctionné en septembre 2012 de six mois de suspension, dont quatre avec sursis, pour avoir créé une association et s'être exprimé sur une radio. Le policier était en congé maladie pour dépression depuis qu'il avait appris, en décembre 2011, qu'il faisait l'objet d'une enquête disciplinaire. Pour le ministère de l'intérieur, « l'état psychique de Monsieur Laurent Cuenca, gardien de la paix à la CRS 24 de Bon Encontre, le rend inapte définitif aux fonctions de CRS, inapte au port d'arme et inapte à un reclassement ».

« Au vu du contexte, on a le sentiment que l'administration cherche à se débarrasser de son agent, relève son avocat Maître François Bleykasten. Et on peut tout de même se poser la question de savoir si son état psychique actuel ne relève pas de la responsabilité de son administration... »

Alors que les policiers qui osent témoigner des dysfonctionnements internes sont toujours très mal vus par la maison police, il n'est pas sûr que le nouveau code de déontologie des forces de l'ordre, prévu par Manuel Valls pour mars 2013, contribuera à libérer la parole. Un article de la version communiquée en décembre 2012 aux syndicats prévoit même expressément qu’« en tout temps, qu’il soit ou non en service, y compris lorsqu'il s'exprime à travers les réseaux de communication électronique sociaux, (le policier ou gendarme) s’abstien(ne) de tout acte, tout propos ou tout comportement de nature à nuire à la considération de la police nationale et de la gendarmerie nationale ».

 

 

Contacté en octobre 2011, le parquet de Grenoble nous avait alors affirmé ne pas être au courant de cette enquête préliminaire, pourtant ouverte depuis huit mois.

 

http://img15.hostingpics.net/pics/396736policechimulus.jpg

Le pot de terre contre le pot de fer


Comme le rappelle Patrick Cahez
sur son blog par cette citation de Sebastian Haffner (Histoire d'un Allemand), "c'est un duel entre deux adversaires inégaux : un Etat extrêmement puissant, fort, impitoyable et un petit individu anonyme et inconnu".

 

La liste des nombreuses irrégularités vient semer le doute quant à l'impartialité du Parquet général de Grenoble et les incohérences tant du ministre de l'Intérieur ou de la Garde des Sceaux, figés dans un abstentionisme qui alimente encore plus la suspicion.


Fax adressé à Claude Guéant et resté sans réponse :

 

Lettre RAR adressée à Michèle-Alliot Marie restée elle aussi sans réponse

 

 

• Le directeur de la police judiciaire a sollicité un faux en écriture public pour se justifier.

 

• Le Parquet général de Grenoble a refusé de réouvrir l'instruction pour harcèlement moral et faux en écriture publique malgré les preuves établies par l'administration elle-même.

 

• Le parquet général de Grenoble a adressé un dossier incomplet à la Cour de cassation qui s'est donc prononcée sans connaître tous les éléments.

 

• Ce même parquet général de Grenoble a persisté dans son refus de transmettre la copie du dossier pour préparer le recours devant la Cour européenne des droits de l'homme.

 

• L'ancien procureur de Grenoble, en poste à Lyon à l'époque, a contredit ses propres appréciations sur le fonctionnaire pour répondre à la demande de la police judiciaire.

 

• La police française a menacé le fonctionnaire malade de l'usage de la force alors qu'il se trouve en Belgique.

 

• Pressions de L'IGPN sur le médecin belge du fonctionnaire.

 

• Mutation disciplinaire chez les CRS alors que le médecin contrôleur l'a jugé inapte aux stations debout prolongées suite au contrôle médical de mars 2007 réclamé par le directeur de la PJ Lyon.

 

• Le ministre de l'intérieur a argué des procédures judiciaires pour éloigner Patrick Cahez définitivement de Grenoble où il a été empêché de travailler pendant près de dix ans.

 

Bien entendu cette liste n'est pas exhaustive et vous pouvez la consulter plus en détail sur le blog de Patrick Cahez.

 

 

D'un point de vue tout à fait personnel je tiens à saluer le courage exceptionnel de ce fonctionnaire de police émérite qui a osé braver et combattre l'injustice au péril de sa santé et de celle de sa famille. Alors que pour beaucoup son combat semblerait perdu d'avance, cet Homme avec un grand H ne s'est pas défilé devant ce qu'il a toujours défendu en entrant à la DCPJ. Son histoire rejoint celle du commandant Philippe Pichon bien que moins médiatisée. A eux deux, ces policiers sont devenus des symboles de la lutte contre la corruption. Leurs combats démontrent que la loi et la justice sont une fois de plus très contradictoires dès lors qu'elles impliquent un État suborné et les "puissants" de ce monde.

 

Chapeau Monsieur Philippe Cahez, quoi qu'il advienne vous resterez un des derniers incorruptibles que la France ait connu.

 

 

 

Ze Papy Mouzeot

 

 

 


Sources : Le blog de Patrick Cahez, Mediapart

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